Les maladies rares : plus courantes qu’on ne le croit
Dr Christopher McMaster, directeur scientifique, Institut de génétique des IRSC
La Journée des maladies rares (en anglais seulement) a encore une fois été couronnée de succès, mais cela ne veut pas dire pour autant que la discussion doit s’arrêter là. Ce moment de l’année revêt un sens particulier pour des milliers de patients et leur famille, car les maladies rares sont très probablement la catégorie de maladies la plus fréquente chez les enfants au Canada.
Que signifient pour les maladies rares les progrès au chapitre des technologies génomiques?
La génomique, en l’occurrence l’étude du génome humain, permet aux scientifiques d’analyser l’intégralité de l’information génétique d’une personne. Cette technologie n’est devenue accessible qu’au cours des dix dernières années : son coût est passé de dizaines de millions de dollars à quelques centaines de dollars, tandis que le temps de séquençage d’un génome humain est passé de plus d’une année à moins d’une journée. Très peu de technologies ont connu une progression aussi fulgurante. Permettant des diagnostics précis et des traitements personnalisés, la génomique est de plus en plus intégrée aux soins cliniques. Les retombées à court terme de la génomique sur la santé des enfants du Canada et du monde entier, ainsi que sur les soins qui leur sont prodigués, seront transformatrices.
Les enfants sont les plus vulnérables face aux maladies « rares »
La plupart des maladies rares sont des maladies infantiles, avec un taux ahurissant de 85 % de maladies rares étant héréditaires (transmises génétiquement d’un parent à l’enfant). De nouvelles études ont permis de déterminer qu’un enfant sur 40 naît avec une maladie héréditaire, et que la moitié d’entre eux ne parviendront pas à l’âge adulte. Il devient évident que les maladies héréditaires que l’on prétend « rares » constituent la cause la plus fréquente de mortalité et de morbidité chez l’enfant. En effet, on estime qu’un lit d’hôpital pédiatrique sur trois au Canada est occupé par un enfant atteint d’une maladie héréditaire. Sans la génomique, il faut en moyenne de cinq à sept ans pour diagnostiquer une maladie rare, qui se manifestera entre-temps par une myriade de symptômes qui amèneront les patients à passer d’un spécialiste à un autre et à subir d’innombrables tests dans l’espoir de recevoir un diagnostic.
Actuellement, ces enfants ne sont pas correctement recensés dans les registres des hôpitaux. Puisque les cas de maladie héréditaire sont habituellement déclarés et documentés en fonction des symptômes (neurologiques, métaboliques, cardiaques, etc.) plutôt que de la cause de ceux-ci, il est difficile de déterminer le nombre exact de Canadiens atteints d’une maladie rare et, par conséquent, la quantité nécessaire de ressources à consacrer aux soins, aux médicaments et à la recherche. De simples changements aux registres des hôpitaux et aux dossiers des patients, telle l’inclusion des codes Orpha (des codes individuels pour les maladies rares connues), aideraient grandement à pallier ce problème. Malheureusement, si ces enfants ne sont pas comptés… ils ne comptent pas.
Quelles sont les prochaines étapes?
Tout n’est pas perdu. Grâce à la génomique, nous sommes aujourd’hui capables de diagnostiquer chez les enfants des maladies héréditaires, et ce, avec une efficacité sans précédent. Les découvertes dans le domaine de la génétique sont immédiatement intégrées aux bases de données nationales et internationales afin d’augmenter la vitesse et la précision du diagnostic des enfants nés avec une maladie héréditaire. Dans une telle affection, il y a un lien direct entre le gène dont l’anomalie cause la maladie et les manifestations cliniques de cette dernière. D’un point de vue scientifique, il s’agit d’un problème soluble, et les chercheurs et chercheuses du pays travaillent fort pour améliorer les traitements des enfants atteints d’une maladie héréditaire « rare » et leurs résultats cliniques.
- Date de modification :