La science du vieillissement : une étude auprès de 50 000 Canadiens

La population canadienne vieillit, et vite! Dans 15 ans à peine, près d’une personne sur quatre aura atteint la mi-soixantaine.
Il y a près de 15 ans, des chercheurs ont heureusement prévu le coup et, avec un soutien financier des Instituts de recherche en santé du Canada, une équipe a mis sur pied l’une des études sur le vieillissement les plus ambitieuses jamais réalisées au pays. L’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ÉLCV) tente de faire la lumière sur le processus, les différences interpersonnelles dans ce contexte et les recommandations à suivre pour vieillir en santé.
En 2011, le Dr Parminder Raina (chercheur principal en chef, Université McMaster), la Dre Christina Wolfson (chercheuse principale, Université McGill) et la Dre Susan Kirkland (chercheuse principale, Université Dalhousie), aux côtés de chercheurs de partout au pays, ont commencé à recueillir des données détaillées auprès de plus de 50 000 Canadiennes et Canadiens de 45 à 85 ans. Un suivi est effectué tous les trois ans jusqu’en 2031.
« Le vieillissement est un processus complexe et il faut donc disposer d’un échantillon de grande taille, explique le Dr Raina. C’est ce qui fait la particularité de l’étude : ses 50 000 participants. Et sur 20 ans, nous avons le temps de recueillir des données à diverses étapes du processus pour comprendre les trajectoires du vieillissement. »
Ces données sont recueillies au moyen d’examens physiques, d’échantillons biologiques et d’entretiens avec les participants, où ceux-ci sont invités à répondre à un éventail de questions : Vous souvenez-vous de la liste de mots que je viens de vous lire? Avez-vous de la difficulté à vous coucher et à vous lever? Combien de médicaments prenez-vous actuellement? À combien d’amis proches vous confiez-vous? Vous sentez-vous en sécurité dans votre quartier?
Les participants subissent également des tests physiques et biomédicaux (prises de sang, mesures de la taille, du poids, du tour de taille, de la force de préhension et de la densité osseuse). L’ÉLCV comporte plus d’une vingtaine de modules abordant la santé physique, la santé mentale, le mode de vie, les facteurs sociaux et les influences environnementales.

« Ailleurs dans le monde, les études de ce calibre portent sur une maladie particulière, explique le Dr Raina. La démence, les maladies cardiaques et le cancer en sont des exemples. Nous savons toutefois qu’à partir de 70 ans, les gens ont souvent trois ou quatre maladies chroniques. Notre but est de brosser un portrait complet du vieillissement au Canada pour approfondir notre compréhension du processus. »
Jouissant d’un taux de rétention de 96 % après le premier suivi, l’étude vient combler un manque flagrant de données sur lesquelles on pourra s’appuyer pour élaborer des politiques sur la santé et les services sociaux pour les aînés d’aujourd’hui et de demain. Cependant, le Dr Raina est conscient que l’étude compte peu de participants à faible revenu ou encore que sa vaste majorité est d’origine européenne. Il ne s’agit pas de facteurs anodins, étant donné que le vieillissement n’est pas pareil pour tout le monde. Afin que les recherches et les politiques futures tiennent compte des diverses réalités du vieillissement au Canada, le Dr Raina espère que l’ÉLCV pourra être enrichie par des études parallèles ciblant différentes populations ethniques et autochtones pour lesquelles l’expérience du vieillissement peut différer de la majorité canadienne.
À peine la mi-parcours franchie, l’étude se fait déjà sentir sur la recherche sur le vieillissement au Canada : les politiques, les pratiques et les connaissances se voient modifiées ou enrichies. Ses données ont été transmises à plus de 600 équipes de recherche au Canada, aux États-Unis, en Australie et en Europe; ont été utilisées dans plus de 700 publications et rapports scientifiques et ont contribué au travail de plus de 1 000 chercheurs et à la formation de 250 stagiaires.
« Je pense que le moment est bien choisi pour intégrer la science dans divers domaines et faire converger les sciences biologiques, les sciences de la population et les sciences sociales afin que nous ayons une vision interdisciplinaire des maladies, des invalidités et du vieillissement, mentionne le Dr Raina. C’est ce qu’a permis l’étude. C’est un genre d’intégration qui ne s’était jamais vu au pays auparavant. »
En bref
L’enjeu
D’ici 2040, près d’un Canadien sur quatre aura au moins 65 ans. Les autorités publiques doivent s’y préparer et ont besoin pour ce faire de données complètes (logement, régime de retraite, soins de santé, transports, infrastructures de soins). Les fournisseurs de soins de santé ont aussi besoin de données pour mieux comprendre comment retarder ou prévenir les maladies, les invalidités et le déclin cognitif.
La recherche
L’Étude longitudinale canadienne sur le vieillissement (ÉLCV) suit les mêmes quelque 50 000 participants sur une période de 20 ans afin d’étudier les facteurs biologiques, psychologiques, sociaux et économiques liés au vieillissement. Ses données sont accessibles aux chercheurs du Canada et du monde entier, ce qui en fait une ressource de premier plan à l’échelle mondiale pour orienter les politiques, les programmes et les pratiques favorisant un vieillissement en santé.
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