Résumé du RIEM
Risque de cancer de la peau lié à l’utilisation d’hydrochlorothiazide
Études menées par le Réseau canadien sur les méthodes interdisciplinaires avancées de recherche sur l’efficacité comparative (CAN-AIM) et le Réseau canadien pour l’étude observationnelle des médicaments (CNODES)
Quelle est la question?
- L’hydrochlorothiazide (HCTZ), un diurétique thiazidique, figure parmi les antihypertenseurs les plus prescrits, mais certaines études ont révélé que l’utilisation du médicament pourrait augmenter le risque de cancer de la peau.
Quel était le but des l’études?
- Les équipes de CAN-AIM et du CNODES ont cherché à déterminer si l’utilisation d’HCTZ induit un risque accru de carcinome kératinocytaire (CK) ou de mélanome par rapport aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA) et aux inhibiteurs calciques, deux classes de médicaments fréquemment prescrits pour traiter l’hypertension.
Comment l’étude du CAN-AIM a-t-elle été menée?
- Une évaluation comparative du taux de développement de CK et de mélanomes chez de nouveaux utilisateurs d’HCTZ et de nouveaux utilisateurs d’IECA a été menée. Les données de quelque 25 000 membres des cohortes du Partenariat canadien pour la santé de demain (CanPath), qui rassemble l’Étude sur la santé Ontario (ESO), le British Columbia’s Generations Project (BCGP), la cohorte CARTaGENE (CaG) du Québec et l’Alberta’s Tomorrow Project, et environ 2 millions de citoyens américains des bases de données de MarketScanMD Commercial et Medicare ont été examinées.
Qu’a révélé l’étude du CAN-AIM?
- L’analyse des données issues de CanPath n’a pas permis de mettre en évidence des différences notables entre l’HCTZ et les IECA quant aux risques, mais les intervalles de confiance (IC) étaient imprécis, de sorte qu’un risque accru n’a pas été écarté. Dans certaines analyses de CanPath, le risque de CK en relation aux doses cumulatives d’HCTZ semblaient varier selon les intervalles de temps. Chez les sujets des cohortes de MarketScan Commercial, le rapport de risques instantanés (RRI) étaient plus précis : 0,96 (IC de 95 %, 0,91-1,00) dans le cas de CK et 1,07 (IC de 95 %, 0,95-1,20) dans le cas du mélanome.
- Les analyses des cohortes de MarketScanMD Commercial ont été ajustées pour tenir compte des effets du tabagisme, et celles de Medicare l’ont été pour tenir compte de facteurs ethniques. Dans les deux cas, les résultats concordent avec ceux de l’analyse principale.
- Le RCEOM est en mesure d’analyser de grandes quantités de données anonymes sur des patients pour fournir des réponses fiables aux questions touchant l’innocuité et l’efficacité des médicaments.
Comment l’étude du CNODES a-t-elle été menée?
- Une étude de cohorte populationnelle multicentrique fondée sur l’analyse de bases de données administratives sur la santé provenant de six provinces canadiennes ainsi que de MarketScanMD Commercial et de Medicare aux États-Unis a été menée. Les cohortes examinées se composaient de patients de plus de 40 ans suivant depuis peu un traitement à base d’HCTZ ou d’un médicament cliniquement pertinent à des fins de comparaison (les IECA dans la première analyse comparative et les inhibiteurs calciques dans la deuxième) entre 1995 et 2018. Le risque de développer un CK ou un mélanome a fait l’objet de comparaisons séparées entre les nouveaux utilisateurs d’HCTZ et les nouveaux utilisateurs d’IECA et d’inhibiteurs calciques. Les résultats ont été combinés au moyen d’une méthode statistique appelée méta-analyse, d’abord pour les données canadiennes seulement, puis en incluant les données américaines.
Qu’a révélé l’étude du CNODES?
- Les cohortes de l’étude comprenaient plus d’un million de patients, dont plus de 80 000 avaient développé un CK, et près de 6 000, un mélanome. Bien que l’utilisation d’HCTZ ne soit pas associée à un risque général accru de CK comparativement à l’utilisation d’IECA (RRI de 1,02 et IC de 95 %, 0,98-1,07) ou d’inhibiteurs calciques (RRI de 1,08 et IC de 95 %, 0,99-1,17), des risques accrus ont été observés en cas d’utilisation prolongée et d’augmentation des doses cumulatives.
- Si l’utilisation d’HCTZ ne semble pas non plus induire un risque général accru de mélanome par rapport à l’utilisation d’IECA (RRI de 1,14 et IC de 95 %, 0,99-1,31), quelles que soient la durée de l’utilisation ou la dose, ce risque augmente de 32 % par rapport aux inhibiteurs calciques (RRI de 1,32 et IC de 95 %, 1,19-1,46), en particulier lors d’une utilisation prolongée (≥ 10 ans) et d’une augmentation des doses cumulatives (≥ 100 000 mg).
- L’inclusion des données de cohortes américaines permet de corroborer cette observation. La taille des échantillons analysés et la durée du suivi des patients constituent les forces de l’étude; un potentiel de biais attribuable à l’absence de mesure de certains facteurs (exposition au soleil, appartenance ethnique, tabagisme) constitue une faiblesse.
Résumé
Le CAN-AIM et le CNODES ont cherché à déterminer si l’utilisation d’hydrochlorothiazide (HCTZ), un antihypertenseur fréquemment prescrit, augmente le risque de développer un cancer de la peau. Les conclusions générales concordantes des deux études révèlent que l’HCTZ n’est pas associé à un risque accru de carcinome kératinocytaire ou de mélanome comparativement aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECA). Cependant, les données de suivi de longue durée dont disposait l’étude du CNODES ont mis en évidence qu’une consommation prolongée de l’HCTZ (≥ 10 ans) et des doses cumulatives élevées (≥ 100 000 mg) augmentent le risque de développer un carcinome kératinocytaire ou un mélanome, en particulier en comparaison aux inhibiteurs calciques.
Messages clés
- Ces conclusions doivent être examinées à la lumière des résultats d’études observationnelles antérieures qui mettaient en lumière le rôle de l’HCTZ dans l’apparition de cancers de la peau; comme la plupart de ces études ne reposaient pas sur une approche comparative, elles pouvaient comporter des biais de confusion.
- Compte tenu de l’utilisation fréquente de l’HCTZ pour traiter l’hypertension, les médecins, les patients et les décideurs doivent évaluer les avantages par rapport aux risques de ce médicament comparativement à d’autres antihypertenseurs, tel les IECA et les inhibiteurs calciques.
Cheffe et équipe de projet du CAN-AIM
- Sasha Bernatsky, M.D., Ph. D.
- Membres de l’équipe (en anglais seulement)
Chef de l’équipe du projet du CNODES
- Laurent Azoulay, Ph. D.
- Membres de l’équipe (en anglais seulement)
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